Henry Buijs, lauréate

ingénieur physicien

Naissance le 3 juin 1939 à Haarlem, Pays-Bas, décès le à 

Entrevue

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Biographie

À en juger par la couverture médiatique, la préoccupation de la société à l’égard de la couche d’ozone semble relativement nouvelle. Or, depuis près de 40 ans, ce souci est partagé par une communauté de chercheurs partout sur la planète. Le Québec a même été chef de file dans le domaine grâce aux innovations de Henry Buijs, l’un des premiers ingénieurs physiciens à avoir mis au point au cours des années 70 la technologie permettant de mesurer l’état précis de la couche d’ozone. Ce scientifique a apporté une contribution exceptionnelle au domaine de la spectrométrie infrarouge à transformée de Fourier et à la conception de techniques analytiques utilisant la spectrométrie.

Élaborée principalement lors de la Seconde Guerre mondiale, la spectrométrie permet de mesurer des phénomènes non visibles à l’oeil. Elle fait appel à des méthodes de calcul sophistiquées qu’Henry Buijs a raffinées alors que la tâche semblait impossible. En 1973, avec deux associés, il fonde l’entreprise Bomem, faisant désormais partie du groupe suisse ABB et devenue l’un des fleurons des entreprises de haute technologie de la région de Québec. Elle est aussi la référence mondiale en matière de spectromètres spatiaux. Avec des ventes atteignant 45 millions de dollars par année, dont 95 p. 100 sont destinées à l’exportation en Europe, aux États-Unis et en Asie, l’entreprise compte près de 200 employés et des partenaires industriels aussi réputés que l’Agence spatiale canadienne, la NASA, l’ESA ou l’Agence spatiale japonaise.

Aujourd’hui directeur technique principal d’ABB, Henry Buijs en est le dernier fondateur présent et le pivot. Il continue d’être très engagé dans cette entreprise où travaille aussi un de ses fils, Thomas, à titre de superviseur de la gestion de produit. « Ma vie est ici », affirme-t-il sans détour. Cet expert, aussi débrouillard qu’à ses débuts, cherche constamment des moyens d’améliorer les produits de l’entreprise. « Il faut toujours se réinventer, ajoute-t-il. C’est une bataille continue, les concurrents sont partout. » L’entreprise travaille présentement à la mise au point de spectromètres spatiaux qui seront utilisés dans des missions d’étude de la haute atmosphère, de vérification de l’application du protocole de Kyoto, mais aussi dans les satellites météorologiques partout à l’échelle mondiale.

Il n’est pas étonnant qu’une telle passion pour les nouvelles technologies continue de stimuler Henry Buijs. Celui-ci est, en quelque sorte, né avec des outils dans les mains! Originaire des Pays-Bas, il arrive au Canada en 1954 à l’âge de 15 ans. Son père est entrepreneur et propriétaire d’un atelier de réparation de bateaux au Pays-Bas, puis de camions à Toronto. Formé au départ en dessin mécanique, le jeune Buijs apprend le métier avec son père, mais aussi l’art de naviguer dans le monde des affaires. Fort de cette expérience technique et commerciale, il choisit, au début de la vingtaine, de poursuivre des études universitaires.

« Je me suis inscrit en génie physique à l’Université de Toronto parce que c’était le programme le plus difficile », déclare Henry Buijs. En 1962, un professeur l’engage pour dessiner les pièces d’un spectromètre conçu pour l’étude des émissions atmosphériques. Emballé par ce travail d’été, Henry Buijs accomplit sa tâche et ira jusqu’à tester l’instrument au Centre de recherche de la défense de Valcartier avec son professeur. La mission connaît un retentissant succès scientifique.

Stimulé par cette expérience, Henry Buijs décide de faire une maîtrise à Toronto et un doctorat à l’Université de la Colombie-Britannique afin de parfaire ses connaissances et de développer les potentialités du spectromètre. L’Université Laval le recrute ensuite comme professeur après un stage postdoctoral. « J’étais très content de retrouver la région de Québec », dit-il. Or, Henry Buijs a l’âme et la fougue d’un entrepreneur. « Devant la lourdeur du financement en milieu universitaire, j’ai vite compris qu’il serait plus facile de me lancer en affaires pour poursuivre mes recherches », raconte-t-il, convaincu d’avoir pris la bonne décision.

En 1973, probablement trop en avance sur son temps, Henry Buijs fonde Bomem. Les premières années sont difficiles, jusqu’au jour où le Service de la recherche du ministère fédéral de l’Environnement a besoin d’un spectromètre pour étudier les réactions chimiques impliquées dans la formation et la destruction de la couche d’ozone. Le premier appareil est enfin vendu. Pendant quelques années, l’entreprise conçoit des spectromètres faits sur mesure principalement pour la recherche scientifique. « J’ai probablement visité 50 p. 100 des universités sur la planète », indique Henry Buijs, en parlant de l’époque où il était responsable du marketing et de la promotion des produits. Maîtrisant aussi bien le français et l’anglais que le néerlandais et l’espagnol, il connaîtra la mondialisation des échanges commerciaux bien avant que le concept existe.

Au début des années 80, devant une concurrence de plus en plus vive, l’entreprise décide d’attaquer le marché des applications industrielles et la production en série commence. Aujourd’hui, le spectromètre conçu par Henry Buijs et son équipe est au coeur du processus de contrôle de la qualité dans des domaines aussi variés que l’industrie de la transformation laitière, les pâtes et papiers, l’industrie pétrochimique, l’industrie pharmaceutique et celle des semi-conducteurs. Dans toutes ces applications, les mesures spectrométriques désormais effectuées en continu réduisent considérablement les rejets de production et permettent d’assurer une plus grande qualité des produits.

Convaincu que son sens de la détermination et son ouverture à l’égard des cultures étrangères ont grandement contribué au succès de l’entreprise, Henry Buijs salue la qualité de la relève présente à Québec dans son domaine. ABB engage une main-d’oeuvre de pointe dans différents secteurs de l’ingénierie, de la chimie et de la physique. Un très grand nombre de ses employés viennent des programmes de deuxième et de troisième cycle de l’Université Laval. « Je les encourage à s’ouvrir aux échanges commerciaux internationaux, c’est la voie de l’avenir », soutient-il.

Les compétences et les réalisations exceptionnelles d’Henry Buijs ont été reconnues au Canada et aux États-Unis par la Société de spectroscopie du Canada et la Coblentz Society qui lui ont respectivement accordé le Barringer Research Award en 1978 et le Williams-Wright Award en 1998. Grâce aux innovations technologiques de ce scientifique, les missions d’étude de la haute atmosphère pourront continuer à nous sensibiliser davantage à la protection de l’environnement et, souhaitons-le, à de rigoureuses mesures d’intervention.

Information complémentaire

Date de remise du prix :
8 novembre 2005

Membres du jury :
André Bazergui, président
Denis Beaulieu
John J. M. Bergeron
Blaise Champagne

Crédit photo :
  • Denis Chalifour
Crédit vidéo :
Production : Éric Pfalzgraf / Studio du Roi
Réalisation : Mario Munger / Éric Pfalzgraf
Caméra, direction photo : Mario Munger
Son : Éric Pfalzgraf
Montage : David Paré / Éric Pfalzgraf
Infographie : Daniel Boulanger
Musique originale : Alexis Le May
Musiciens : Katia Durette, Yana Ouellet, Stéphane Fontaine, Annie Morier, Caroline Béchard, Suzanne Villeneuve, Benoît Cormier, Jean Robitaille, André Villeneuve, Daniel Tardif, Alexis Le May, Éric Pfalzgraf.
Annonceur : Gilles Théberge
Enregistrement de la musique et mixage : Éric Pfalzgraf
Photos supplémentaires, animations et extrait de film pour :
M. Cyril Simard : Suzanne O’neill, Éric Saint-Pierre, Guy Rainville, François Maltais;
Mme Francine Décary : Héma-Québec;
M. Henry Buijs : ABB;
M. Fernand Dansereau : ONF.