Nabil G. Seidah, lauréate

Neuroendocrinologue

Naissance le 1 février 1949 à Héliopolis, Égypte, décès le à 

Entrevue

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Biographie

Il n’y a aucun doute : derrière le regard chaleureux et compatissant du docteur Nabil G. Seidah se cache un cerveau brillant, avide de connaissances. En plus d’avoir codécouvert la ß-endorphine, ce spécialiste en biochimie des protéines, en enzymologie ainsi qu’en biologie moléculaire et cellulaire est reconnu comme un chef de file mondial pour ses travaux liés au domaine des pro-protéines convertases, enzymes impliquées dans le découpage des protéines en plus petites molécules actives.

Parcours d’une fructueuse carrière
Scientifique de renommée internationale, Nabil G. Seidah est professeur titulaire au Département de médecine de l’Université de Montréal et directeur du Laboratoire de biochimie neuroendocrinienne de l’Institut de recherches cliniques de Montréal. Depuis sa tendre enfance, il est fasciné par le mécanisme de cette incroyable machine qu’est le corps humain. Dès l’âge de cinq ans, sitôt ses devoirs faits à son retour de l’école, il passe des heures à feuilleter les pages des dictionnaires Larousse médicaux illustrés de 1900-1950. C’est là, aux abords du Caire en Égypte, qu’il se découvre une forte préférence pour les sciences biomédicales et la médecine. Cette véritable passion deviendra plus tard une vocation. La rencontre de sa grand-mère paternelle alors qu’il a environ sept ans y est également pour quelque chose. Souffrant de schizophrénie, elle a un air hagard qui ébranle l’être empathique qu’est déjà Nabil G. Seidah. À ce moment précis, celui qui consacrera sa vie à la recherche se jure qu’il fera quelque chose pour participer à la guérison des maladies en essayant de comprendre ce monde médical plein de mystères.

Sa fascination pour les sciences le pousse à s’inscrire au baccalauréat en sciences à l’Université du Caire. Il a alors 18 ans et toute la vie devant lui, une vie qu’il consacrera à la recherche et à la compréhension du monde qui l’entoure. S’ensuit alors un voyage qui le mènera de l’autre côté de l’Atlantique, à Washington DC plus précisément, afin de poursuivre une thèse en biophysique et en chimie physique. C’est avec en trame de fond la guerre au Viêtnam qu’il plonge encore plus profondément dans le monde des sciences, se consacrant totalement à sa vie de futur chercheur.

Après cette incursion aux États-Unis, il entreprend un stage postdoctoral comme physiochimiste à l’Université de Montréal et se joint à l’Institut de recherches cliniques de Montréal. Ce sera le début d’une fulgurante carrière en recherche, jalonnée d’efforts et couronnée de succès. En 1976, sa codécouverte de la ß-endorphine, une hormone qui contrôle la douleur et le bien-être chez les mammifères, le propulse dans l’arène internationale et influence la suite de sa carrière scientifique.

Puis, poussé par son désir insatiable de savoir, de connaître et de découvrir, cet éminent chercheur devient bien vite directeur de son propre laboratoire de biochimie neuroendocrinienne. Nous sommes en 1983. Son équipe et lui travaillent dès lors d’arrache-pied pour déterminer la nature des convertases, enzymes qu’on pourrait comparer à des ciseaux moléculaires qui façonnent la forme active des hormones et de nombreuses autres protéines.

Bien que difficiles pour le docteur Seidah et son groupe, ces années d’acharnement et de labeur finissent par porter leurs fruits en 1990. Durant cette année charnière, il découvre les pro-protéines convertases (PC) et procède à leur caractérisation moléculaire. Cette découverte majeure demeure le point central de sa carrière. Au fil des années, ces travaux lui permettront de trouver sept des neuf convertases. « On a dû se battre pendant de nombreuses années et essuyer plusieurs échecs et déceptions avant d’arriver à découvrir les convertases, l’une après l’autre », se rappelle-t-il.

Cette aptitude à ne jamais baisser les bras, il la doit en grande partie à son père, qui lui répétait ces phrases dès son plus jeune âge : « Travaille fort, ne cherche pas à t’enrichir au dépend des autres, mais fais de ton mieux pour aider la société. Ce que tu as dans la tête, cette richesse de connaissances et de découvertes, partage-la; personne ne peut te l’enlever ».

Ce travail colossal donne les résultats escomptés : le docteur Seidah réussit à démontrer l’importance des PC dans des maladies aussi répandues que le cancer, le sida, les pathologies cardiovasculaires, l’Alzheimer et les maladies liées au syndrome métabolique, telles que le diabète, l’obésité et l’hypercholestérolémie. C’est donc dire que de nombreuses pathologies dépendent du fonctionnement des PC. Par exemple, le sida ne pourrait pas pénétrer dans nos cellules s’il n’était pas coupé auparavant par des convertases. « La découverte de la ß-endorphine et celle des convertases sont mes plus chères réalisations. Elles ont eu des retombées fabuleuses dans le domaine de la science et sur la santé de notre société », confie le docteur Seidah.

Cette avancée remarquable en biomédecine a tôt fait d’attirer l’attention des scientifiques travaillant dans des domaines aussi variés que l’oncologie, la lipidologie ou la virologie, pour ne nommer que ceux-là. C’est en 2003 que le groupe du docteur Seidah découvre le dernier membre de la famille des PC, la protéine PCSK9, qui joue notamment un rôle déterminant dans l’hypercholestérolémie et le syndrome métabolique, deux maladies d’actualité. La découverte de cette enzyme et de son rôle fondamental dans la régulation des niveaux de cholestérol crée une émulation mondiale dans l’industrie pharmaceutique.

Depuis, et après 23 années d’efforts, ce scientifique doué et astucieux est devenu un acteur clé du nouveau domaine des convertases. Son expertise fait en sorte qu’il est en demande tant du côté des chercheurs étrangers que du côté des laboratoires pharmaceutiques majeurs, qui le consultent activement. Ainsi, grâce au docteur Seidah et à son équipe, le Québec peut se vanter d’être le berceau des convertases et de bénéficier d’un rayonnement international sur ce plan, attirant par le fait même bon nombre de scientifiques internationaux.

Des distinctions de prestige
Le docteur Seidah a été élu membre de la Société royale du Canada et de l’Ordre du Canada ainsi qu’officier de l’Ordre national du Québec. Son travail est reconnu dans son domaine et au-delà. La qualité et l’envergure de sa production scientifique (il a à son actif plus de 600 publications dans des revues scientifiques de haut calibre), ses talents de chercheur, les nouveaux horizons de recherche engendrés par son travail, son rayonnement international et la formation qu’il a offerte à de jeunes chercheurs actifs à travers le monde (il a assuré la supervision de plus de 100 étudiants et stagiaires postdoctoraux) lui ont assuré de nombreuses et prestigieuses distinctions. Il a notamment partagé le Manning Award of Distinction et la médaille d’or de recherche et développement de l’Association canadienne de l’industrie du médicament, avec le docteur Michel Chrétien (cette médaille n’a été accordée que 15 fois depuis 1945). Actuellement, il se place en tête du classement PubMed au Canada et figure parmi les 20 meilleurs scientifiques au monde reconnus pour leurs travaux sur les PC. Sa renommée fait également de lui un conférencier très convoité.

Malgré cet emploi du temps chargé, le docteur Seidah réussit tout de même à se consacrer à ses autres passions. Sa famille et ses amis prennent une place importante dans sa vie, tout comme les voyages, le vélo et la plongée sous-marine. Il parle de ces deux sports comme une façon de découvrir la Terre « du dessus comme du dessous, et de réaliser comme tout est intimement interconnecté ».

De nouvelles avancées concernant les propriétés des convertases permettront très probablement l’élaboration de nouveaux traitements pour un grand nombre de maladies. « La joie qui accompagne une découverte qui a des retombées importantes sur la santé de notre société est incommensurable », rapporte avec enthousiasme le prestigieux chercheur. Une brise d’espoir flotte dans la pièce lorsqu’il prononce ces paroles. Difficile de trouver mieux en matière d’inspiration.

Information complémentaire

Crédit photo :
  • Rémy Boily
Crédit vidéo :

Production : Sylvain Caron Productions Inc
Réalisation :
Sylvain Caron
Coordinatrice de production :
Lynda Malo
Caméra et direction photo :
Jacques Desharnais, Vincent Chimisso
Prise de son :
Luc Gauthier
Maquillage :
Hélène-Manon Poudrette
Montage :
Sylvain Caron, Frédéric Blais-Bélanger
Infographie :Jean-Maxime Couillard
Mixage sonore : Studio SonG
Musique originale : Christine Boillat
Musiciens :
André Bilodeau, Christine Boillat, David Champoux et Daniel Marcoux
Entrevues :
Christian St-Pierre
Lieu des tournages :
Centre d'archives de Montréal

Texte :
  • MDEIE