André Gladu, lauréate

Biographie

Après des études en design graphique à l’École des beaux-arts de Montréal, en design au London College of Printing et en cinéma à la Columbia University, André Gladu aborde la réalisation de films documentaires en 1971. Inspiré par les arts et par ce qu’ils révèlent de la société, le cinéaste entreprend plusieurs projets de films et crée un patrimoine unique sur les cultures francophones d’Amérique. Ses sujets de prédilection : les traditions musicales populaires, la peinture, la prise de parole et la poésie. Son principal outil de travail : l’intuition.

« J’ai entrepris mon travail porté par la conviction qu’un peuple développe toujours au fil du temps une culture qui lui ressemble et qui lui permet de préserver ce dont il a besoin pour rester vivant. »

Parmi les 48 documentaires d’auteur qu’il a réalisés en 45 ans, mentionnons quelques films marquants : Matawinie – la rencontre des eaux (2016); Marron (2006); Gilles Vigneault – Portager le rêve (1997) coréalisé avec Jean-Claude Labrecque; La conquête du grand écran (1996); Gaston Miron – Les outils du poète (1994); Liberty Street Blues (1988); Pellan (1985) et Marc-Aurèle Fortin 1888-1970 (1983). Ses films, denses et à grande portée, lui ont valu nombre de prix et de présences dans des festivals.

Le Son des Français d’Amérique, une série de documentaires coréalisés avec Michel Brault de 1974 à 1980, figure dans une catégorie à part. Dans cette série comprenant à elle seule 27 films, le cinéaste explore l’univers des musiciens traditionnels francophones qui essaiment sur le vaste territoire de l’Amérique du Nord. Si André Gladu capte partout les accords, les chants et les témoignages de musiciens, il réussit surtout à dévoiler des personnes de cœur et à nous faire entendre une parole qui a traversé le temps.

« J’ai compris, entre autres, que la musique des violoneux avait joué pour nous le même rôle que le blues et le jazz pour les Afro-Américains. Avec ses contredanses, ses gigues et son tapement de pieds, le violoneux forçait les participants à oublier, le temps d’une danse, leur difficulté de vivre. Il répondait à un besoin de cohésion sociale à une époque où les populations francophones sur le continent étaient maintenues dans un état de pauvreté et de sous-développement chronique. »

Avec Le Son des Français d’Amérique, André Gladu marque un repère dans l’histoire du cinéma québécois, puisque cette œuvre a été inscrite, en 2017, au Registre international Mémoire du monde de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO). La reconnaissance de la valeur universelle de cette série confirme, l’humanité et le souci de transmission avec lesquels il exprime son rapport au réel. Sa filmographie témoigne d’ailleurs de son talent à saisir l’instant, l’imprévu, l’invisible et, ce faisant, la sincérité de l’âme humaine. Il faut dire qu’il a suivi la voie des grands du cinéma direct, dont Michel Brault, Pierre Perrault, Bernard Gosselin et Jean Rouch.

« Le cinéma est un travail d’équipe et cela demande de collaborer avec des gens à la fois solides professionnellement et matures personnellement. J’ai beaucoup appris au contact des autres. On n’y arrive pas tout seul. »

Certes, André Gladu sait tracer le chemin pour raconter. Dans ses films, la caméra se mêle aux protagonistes pour mieux suivre l’action, tandis que le micro enregistre les confidences et crée la proximité avec le sujet. Tout devient propice à la spontanéité et à l’authenticité pour mieux révéler la nature profonde des personnages. La clé, selon lui, c’est le lien de confiance qui permet aux participants de s’exprimer sans détour. Au moment de la projection, cette captation sans filtre, fait oublier l’écran et donne l’impression au spectateur d’être un témoin privilégié de l’histoire.

« Il y a une forme d’intelligence dans le cinéma documentaire, vécu sur le terrain, qu’on ne peut pas acquérir dans les livres ou à l’école. Mes sujets de films m’ont éduqué et je ne serais pas le même si je n’avais pas rencontré Pellan, des violoneux, Gaston Miron, des musiciens de jazz de La Nouvelle-Orléans et tous ces porteurs de tradition en Acadie, en Bretagne ou en France. Une bonne partie de mon inspiration et de mon éducation m’ont été données par ces gens, qui m’ont fait confiance et m’ont donné le meilleur d’eux-mêmes. »

Par ses œuvres socialement engagées, André Gladu a réalisé une cartographie des pratiques culturelles méconnues et, ainsi, mis en lumière des collectivités dans l’ombre. Tout au long de son parcours, il a cherché à mettre son art au service des artistes et des peuples francophones luttant pour leurs droits et la survie de leur culture afin que leur contribution à l’Amérique soit reconnue.

Information complémentaire

Membres du jury :
Michel La Veaux
Martin Bilodeau
Annie Jean
Nancy Florence Savard

Crédit photo :
  • © Éric Labonté