William Foulkes, lauréate

Biographie

En identifiant les facteurs héréditaires qui favorisent l’apparition de cancers particuliers, William Foulkes a ouvert la voie à un meilleur traitement pour de nombreux patients.

Dans son cabinet de l’Hôpital général juif de Montréal, William Foulkes est perplexe. Le médecin chercheur vient de rencontrer une dame qui combat un cancer du sein pour la deuxième fois. Comme sa mère avant elle. Et sa grand-mère… Pourtant, son génome ne révèle aucune des mutations reconnues pour causer ce type de maladie héréditaire. Que se passe-t-il donc? La réponse se trouve dans l’échantillon sanguin que la patiente apporte au laboratoire. L’équipe y détectera une anomalie du gène PALB2 qu’elle associera à la genèse de tumeurs, une avancée publiée en 2007 dans la prestigieuse revue Proceedings of the National Academy of Sciences.

Des découvertes semblables, le directeur du Programme de génétique du cancer à l’Université McGill en a fait plusieurs. Tel un enquêteur, il suit les indices laissés dans l’ADN par un mal meurtrier. À partir de cas réels, il élucide le mécanisme de maladies héréditaires, ouvrant ainsi des avenues pour améliorer les thérapies. Un travail qui aide à traiter une diversité de problèmes de santé rares touchant surtout les femmes et les enfants.

Cet auteur de près de 600 articles scientifiques est reconnu pour poser sur sa discipline un regard aussi érudit que novateur. Dans les lettres soutenant sa candidature au prix Wilder-Penfield, ses pairs louangent sa faculté à combiner jugement clinique et créativité en laboratoire. Et, surtout, à communiquer sa vaste expertise sur le sujet.

C’est la quête du gène BRCA1, qu’on soupçonne alors d’être impliqué dans le cancer du sein, qui persuade William Foulkes de quitter Londres pour Montréal en 1994. Le postdoctorant souhaite explorer cette mutation auprès du spécialiste Steven Narod, à l’Université McGill. Il débarque avec sa famille juste avant la naissance de son troisième enfant. Six ans plus tard, il obtient la licence de spécialiste en génétique médicale requise pour la pleine poursuite de ses recherches.

En s’établissant à Montréal, le Dr Foulkes fait un choix décisif pour sa carrière. Le Québec est en effet un lieu d’exception pour étudier la génétique. Quand une nation descend d’un nombre restreint de pionniers, elle présente des particularités dans son ADN; c’est le cas des gens de souche canadienne-française. Cet « effet fondateur » facilite la compréhension des processus en jeu dans l’hérédité du cancer.

Dans cet environnement favorable à la recherche, le médecin développe une approche intuitive qui repose sur l’expérience clinique, le jugement et le hasard. « Les patients deviennent des sources directes de découvertes, et les résultats de nos travaux leur sont rapidement transférés. Être sur le terrain s’avère très utile! », explique-t-il.

En 2003, sa méthode mène à une première percée importante. En étudiant une série de cas, l’équipe constate que les mutations du gène BRCA1 sont liées à une forme atypique de cancer du sein, fondamentalement différente des autres. Celle-ci s’attaque de manière agressive aux jeunes femmes. Mieux comprendre sa nature particulière permet de traiter les patientes de façon plus ciblée. La découverte fera l’objet d’un article scientifique qui sera cité plus de 1 000 fois par les pairs.

Fin 2010, le laboratoire est propulsé sur la scène internationale. Le Dr Foulkes publie dans le New England Journal of Medicine un article relatant comment une anomalie du gène BUB1B a engendré de multiples tumeurs chez un seul homme. « Partir de l’histoire d’une famille pour examiner un phénomène médical, je trouvais ça passionnant, mais je n’étais pas sûr que les autres partageaient mon enthousiasme! Qu’un grand journal s’y intéresse a validé mon approche », raconte le spécialiste.

Depuis 15 ans, le professeur Foulkes tient le Symposium international sur le cancer héréditaire du sein et de l’ovaire. Cofondé avec un collègue, l’événement regroupe à Montréal tous les deux ans les experts mondiaux du domaine. Il propose aussi des conférences populaires qui éclairent les patientes sur les récentes recherches et leurs applications cliniques.

Son prochain projet de taille? Le développement du Réseau d’information sur le syndrome DICER1. Cette mutation, d’abord repérée chez des familles québécoises souffrant d’une forme héréditaire de goitre, engendre une panoplie de troubles que l’équipe étudie depuis une décennie. Le registre consignera les variantes du gène associées à des maladies tout en collectant des informations diverses : l’historique des patients, les facteurs de risque, les échantillons biologiques… À terme, l’outil permettra d’offrir de meilleurs conseils aux personnes touchées.

Malgré les distinctions qui couronnent sa carrière, William Foulkes envisage l’avenir avec humilité. Cet amateur d’art applique la stratégie de Bill Frisell, un guitariste qu’il admire : simplement suivre la musique. « En science, je n’ai pas de certitude sur ma destination, fait-il. Seulement une vague idée du chemin à emprunter. »

Information complémentaire

Membres du jury

Claire Dominique Walker (présidente)

Elela Sherif-Abou

Guy Poirier

Katerine Borden