Michèle Cournoyer, lauréate

Naissance le 14 novembre 1943 à Saint-Joseph-de-Sorel, décès le à 

Témoignage

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Biographie

La femme est d’une grande douceur; ses réalisations cinématographiques, percutantes. Dans le milieu du cinéma d’animation, pour lequel le Québec est reconnu internationalement, Michèle Cournoyer se distingue par ses œuvres d’un grand esthétisme dans lesquelles le corps et l’inconscient occupent une place de premier plan. Ses créations universelles et intemporelles, sans mot dire et en un court laps de temps, impriment une trace indélébile depuis quarante-cinq ans.

Des études en photographie, en arts graphiques et en cinéma d’animation à l’école des Beaux-Arts de Québec et de Montréal mènent Michèle Cournoyer en Angleterre, puis en Italie. C’est là qu’elle s’imprègne de ce que les arts contemporains offrent de mieux sur la scène internationale; elle y découvre le mouvement dadaïste, qui lui inspirera ses premiers films d’animation. Au Hornsey College of Art, à Londres, elle réalise en photos peintes L’homme et l’enfant, tandis que la commune d’Urbino lui inspire Spaguettata.

Son retour au Québec marque ses débuts dans le monde du long métrage. Elle collabore comme directrice artistique, costumière et scénariste à plusieurs films importants de la nouvelle vague québécoise, dont La vie rêvée de Mireille Dansereau et La mort d’un bûcheron de Gilles Carle.

Anticonformiste, Michèle Cournoyer réalise ensuite de façon indépendante les courts métrages Toccata et Old Orchard Beach, P. Q, qui font preuve de beaucoup d’audace et de créativité. Dominé par la métamorphose, son style s’affine. En 1988, Dolorosa, son tout dernier film indépendant, marque la transition entre l’humour, présent dans ses premières réalisations, et la tragédie. Dans cette œuvre aussi viscérale qu’authentique, elle calque, à partir d’une prise de vue réelle, les pas de deux danseurs étoiles de la compagnie La La La Human Steps, dont Louise Lecavalier.

En 1989, avec La basse cour, Michèle Cournoyer remporte le concours Cinéaste recherché(e) du Studio d’animation du Programme français de l’Office national du film (ONF), où elle sera engagée comme réalisatrice. Cette œuvre plus personnelle marque un tournant dans sa carrière. Suivra Une artiste, un court métrage réalisé en rotoscopie numérique, inspiré de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant.

À partir de 1999, la réalisatrice engagée porte à l’écran des problématiques sociales pour lesquelles elle privilégie le dessin, cru et pur, à l’encre sur papier. Avec Le chapeau, troublante exploration du thème de l’inceste, elle bouleverse les spectateurs du monde entier. Ce chef-d’œuvre est décrit comme un film coup-de-poing qui ne laisse personne indifférent. Michèle Cournoyer réalise ensuite Accordéon, une œuvre puissante qui se retrouve en compétition au Festival de Cannes, puis Robe de guerre, un film dans lequel les conflits armés sont ressentis à travers une femme kamikaze. Avec la même technique, Soif, en 2014, plonge littéralement le spectateur dans les dédales de l’alcool.

Source créatrice intarissable, Michèle Cournoyer se renouvelle sans cesse. En 2016, elle entreprend un nouveau film sur le thème des amours mortes où les images dessinées à l’encre prennent vie numériquement.

En mettant en scène la femme comme personnage principal de chacune de ses créations, voire en se plaçant elle-même au centre de son œuvre, Michèle Cournoyer transcende une intériorité rarement véhiculée à l’écran. Avec ses images sombres et surréalistes et son point de vue intrinsèquement féminin, elle livre des messages lourds de sens. « Mon langage, ce sont les images », dira cette cinéaste de l’intime.

Michèle Cournoyer obtient le Prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques. Ses films font rayonner le Québec sur la scène internationale et remportent plusieurs prix dans d’importants festivals, d’Annecy à Zagreb, en passant par Banff, Chicago, Dresden, Hiroshima, Montréal, Ottawa et Toronto. Le talent de la réalisatrice est également honoré par l’association Femmes du cinéma, de la télévision et des nouveaux médias, puis récompensé à deux reprises par l’Association québécoise des critiques de cinéma. Le chapeau est sélectionné à la Semaine de la critique dans le contexte du Festival de Cannes, en 2000 et, la même année, le Festival international du nouveau cinéma et des nouveaux médias fait la rétrospective de l’ensemble de ses œuvres. Enfin, Robe de guerre et Le chapeau sont couronnés de prix Jutra (aujourd’hui prix Iris du cinéma québécois). Reconnaissance ultime, Le chapeau figure au palmarès des cent plus importants courts métrages d’animation de tous les temps. L’œuvre de Michèle Cournoyer fait d’ailleurs l’objet de plusieurs études dans le milieu de l’enseignement.

Information complémentaire

Membres du jury :
Michel La Veaux
Bachir Bensaddek
Chloé Robichaud
Pierre Even

Crédit photo :
  • © Sophie Quevillon
Texte :
  • MCC