Denis Gougeon découvre ses aptitudes pour la musique à l’adolescence. Il commence en autodidacte son apprentissage de la théorie musicale et, à 15 ans, agrandit ses perspectives avec la guitare. Le récital solo qu’il donne peu de temps après le conforte dans sa vocation.
Après un diplôme en guitare, un baccalauréat en musicologie ainsi qu’une maîtrise en composition, sa carrière prend son envol dans les années 1980.
Doté d’une énergie inventive qui n’aura de cesse de l’habiter, le compositeur décroche ses premiers contrats et ne tarde pas à recevoir des commandes de différents horizons : Ludus (1980) pour l’ensemble Répercussion, Éternité (1985) pour son épouse, la soprano Marie-Danielle Parent, ou encore Heureux qui, comme… (1987) pour la Société de musique contemporaine du Québec. Nombreux sont les solistes, ensembles et institutions à profiter de sa versatilité et de son appétence envers différents genres musicaux.
L’année 1989 s’avère particulièrement importante pour lui, car elle marque son entrée en résidence à l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) en tant que premier compositeur, poste qu’il occupera jusqu’en 1992.
Rares sont les personnes qui, dans ce milieu, peuvent vivre entièrement de leur œuvre. Denis Gougeon est une exception à la règle, à tel point que l’on n’hésite pas à parler de « puissance créatrice » pour le décrire. En 1 an, entre 1992 et 1993, il n’écrit pas moins de 9 pièces, élevées au rang de classiques pour certaines, à l’image d’Un train pour l’enfer (1993). De nouveau, entre 1999 et 2000, il compose 6 œuvres, dont le conte musical Planète Baobab (2000). Danse, littérature, théâtre, jeunesse : le milieu de la culture ne tarit pas d’éloges devant son écriture. Un talent d’où se dégage, comme le dit volontiers Denis Marleau, metteur en scène, « une variété de sentiments et de sensations, de rythmes et de couleurs, une manière vibrante de donner à entendre les sons de la vie. »
Si on complimente souvent le compositeur pour sa maîtrise de l’orchestration et sa faculté à mettre en valeur chacun des instruments, nombreux sont les membres de la communauté artistique à relever ses qualités humaines. Authentique, généreux, accessible : il tient compte de la personnalité des interprètes pour qui il crée, se soucie de nourrir leur enthousiasme et de construire une relation privilégiée dans toutes ses collaborations. « On ne peut imposer notre musique. C’est seulement par les sons que l’on peut attirer leur attention et les convaincre de commander une œuvre. Et pour moi, écrire une œuvre sur mesure, inspirée par les interprètes, c’est le bonheur », confie-t-il.
C’est sans doute cette volonté de partage qui le met sur la voie de l’enseignement. Chargé de cours à l’Université de Montréal de 1985 à 1988, professeur de composition invité à l’Université McGill de 1986 à 1987, il intègre la faculté de musique de l’Université de Montréal en 2001.
Dans les années 2000, il continue d’agrandir son champ des possibles. En 2001, il compose Clere Vénus, qui remportera un Prix Juno. En 2002, ARTE! pour le 100e anniversaire de l’Orchestre symphonique de Québec et Alice au pays des merveilles pour l’Arsenal à musique en 2003.
Du festival Tuckamore à Terre-Neuve au Manitoba Theatre for Young People, en passant par Esprit orchestra en Ontario, il devient incontournable sur la scène canadienne. Cette notoriété, qui lui fait franchir les barrières disciplinaires au ballet comme au théâtre, l’amène également à traverser les frontières du pays. Fait peu courant pour un compositeur québécois, son travail résonne tout autant à l’étranger. Ce statut particulier s’illustre par de prestigieuses commandes pour la musique de 2 ballets : Emma B. (1998) pour le Bayerisches Staatsballett de Munich et Liaisons dangereuses (2000) pour le Ballet national de Norvège.
Depuis 4 décennies, sa contribution est considérable avec plus de 120 œuvres pour orchestre, musique de chambre, opéra, ballet, scène, instruments solistes et voix. Malgré tout, Denis Gougeon n’en a pas fini avec la création et possède une volonté toujours aussi intacte d’apporter sa pierre à l’édifice musical. En 2024, Jubilate!, sa partition orgue-orchestre, a été présentée en clôture de saison par l’OSM.
« Je continuerai de composer tant que j’aurai la santé et de bonnes idées. J’aimerais beaucoup composer un opéra, mais cela prend des moyens et du temps. Alors, je n’ai pas encore poussé la chose, mais j’y réfléchis beaucoup. Des sujets m’intéressent; il faut juste trouver la bonne occasion pour le faire. »
Puisque ses compositions passées et actuelles continuent de s’inscrire comme des références, tout porte à croire que son influence n’est pas près de s’atténuer. « Ce prix, c’est l’invitation à la fête, celle de la reconnaissance, et c’est aussi se sentir accueilli par tous ceux et celles qui ont le Québec à cœur et au cœur », résume-t-il.