« Faut qu’y en aye une qui l’fasse. Pis j’donnerai pas ma place! », a chanté Diane Dufresne.
Heureusement, elle a pris sa place tout entière dans notre univers culturel, devenant ainsi une icône de la chanson québécoise.
Première rockeuse francophone. Femme libre et rebelle. Intègre et créative jusqu’au bout des ongles. Superstar, malgré elle; réelle force de la nature, partout sur son passage, Diane Dufresne a soulevé les passions.
Des cabarets du Paris Rive Gauche jusqu’aux « clubs tough » du Québec, Diane Dufresne a d’abord cherché son chemin. « J’ai connu un certain succès à Paris. Je pensais que c’était parti pour un tour, mais, ici, ma carrière n’a pas fonctionné au début. Avec mon côté rebelle, je suis devenue la fille de club. Je montais sur les tables tellement je voulais que les gens se taisent. C’est là que Clémence Desrochers est venue me voir pour faire Les girls. J’adorais Clémence, elle a vu autre chose en moi. »
La revue Les girls marque un grand virage dans le parcours de Diane Dufresne. C’est à cette époque qu’elle rencontre le compositeur et musicien François Cousineau, qu’elle présente au parolier Luc Plamondon. La chimie opère et le trio de création prend vie, multipliant les succès et les audaces.
Ainsi, en 1972, son premier album surgit comme un coup de tonnerre dans un ciel bleu. « Dans Tiens-toé ben, j’arrive!, je parlais le joual et je hurlais. Je me suis dit : “Je me lance et ça peut finir là.” »
N’empêche, l’artiste se révèle. Diane Dufresne est une voix, un phénomène de scène! On la nomme diva, mais elle est d’abord modeste et convaincue que tout reste à faire. On la qualifie d’exubérante, mais elle est avant tout réservée et, surtout, dévouée à son public. On la pense provocatrice, mais elle cherche à dépasser ses propres limites. Car chanter ne suffit pas pour elle. La voix se met au service des émotions et de la théâtralité pour le public.
« C’est un privilège d’aller sur scène et à la rencontre du public. J’écris toujours les spectacles en fonction de ce que ressent et voit le public, du point de vue de la salle. Non pas de celui de la scène et de ce que je projette. J’inverse le regard. C’est peut-être ce qui a créé les rendez-vous. Je n’ai jamais voulu que le public soit passif. »
De Mon premier show à Magie Rose, de l’Olympia de Paris à la Place des Arts, elle enfile les projets en se métamorphosant pour mieux surprendre son public et – sans le vouloir! – déstabiliser la critique. « J’étais dans un esprit créatif, envers et contre tous. »
À vol d’oiseau, les quelque 56 000 personnes vêtues de rose venues aduler leur idole au stade olympique lors de Magie Rose donnent la pleine mesure de l’effet Dufresne. « J’ai dû me préparer à vivre ces émotions. Pendant des mois, j’ai marché dans les rues la nuit, avec un chronomètre, pour apprendre à être centrée en traversant le stade. Mais quand tu arrives et que tu vois le stade tout rose, tu te dis : “C’est eux qui mènent.” Et c’est ce qui est extraordinaire, c’est vraiment eux qui mènent! »
Diane Dufresne chante une époque, celle du Québec moderne. Elle assume son rock décomplexé et incarne la femme émancipée. Son grand talent artistique s’épanouit aussi dans l’écriture de chansons et dans la peinture. Ainsi, elle est devenue fondamentale et incontournable dans le Québec culturel.
« Les réalisations qui me chavirent le plus viennent du public. On me critiquait pour mes costumes, que l’on disait insensés et extravagants, mais le public était habillé de manière plus excentrique que moi! C’était la réponse. Le public a toujours été là. Tu donnes et tu reçois. »
Du concert intime jusqu’au spectacle le plus grandiose, Diane Dufresne vit sur scène comme sur la corde raide. Sans compromis. Le cœur ouvert. Les bras tendus. Portée par son public, qu’elle sait transporter en retour.
La beauté de son parcours réside dans le fait qu’elle n’a rien perdu de la fille de Tiens-toé ben, j’arrive! Anticonformiste, audacieuse et « surtout pas assagie ».