Gilles Fontaine se distingue par sa polyvalence remarquable. Atout rare dans
le domaine de l’astrophysique, ce professeur du Département de physique
de l’Université de Montréal, théoricien en astrophysique,
se révèle de plus un excellent astronome observateur.
La stratégie de recherche de Gilles Fontaine s’articule autour de l’approche
combinant la théorie par simulation numérique et des observations
astronomiques. Il s’intéresse particulièrement à l’évolution
des étoiles et contribue de façon significative depuis le début
de sa carrière à l’étude de ces corps stellaires fascinants
que sont les naines blanches. Ces étoiles, produits ultimes des phases
finales de l’évolution stellaire, sont comparées à des
vieillards. On y trouve des conditions physiques extrêmes non reproductibles
sur la Terre. Les travaux de modélisation de Gilles Fontaine vont lui
permettre de jeter les bases d’une véritable théorie de l’évolution
de ces étoiles. Il démontrera notamment que les naines blanches
peuvent servir de bancs d’essai pour les théories d’équation d’état,
de coefficient de transport et de transition de phase solide/liquide à
une très haute densité.
Ce scientifique québécois se démarque aussi dans le domaine
de l’astéroséismologie, science qui s’occupe d’interpréter
les variations d’intensité lumineuse de certaines étoiles pulsantes
(ou vibrantes) quant à leur structure interne. Avec ses associés,
Gilles Fontaine devient au fil des années chef de file en ce qui concerne
l’astéroséismologie des naines blanches. Il contribue à
la découverte et au décodage de nombreuses étoiles pulsantes.
En 1996, les travaux du groupe de Gilles Fontaine lui permettent d’établir
les bases en matière d’astéroséismologie des étoiles
sous-naines, génitrices d’une fraction des naines blanches, dont les
instabilités vibratoires sont insoupçonnées jusqu’alors.
La tête dans les étoiles
Cet homme simple se passionne pour l’astronomie dès l’adolescence. En
1969, il décide de mener des études conduisant à l’obtention
d’un doctorat en astrophysique théorique sur les naines blanches à
l’Université de Rochester : c’est la piqûre. Il revient au Québec
faire des études postdoctorales à l’Université de Montréal
au moment même où se forme le groupe d’astronomes observateurs
avec la création de l’observatoire du mont Mégantic. Sentant le
moment propice, l’astrophysicien délaisse alors quelque temps la théorie
et s’initie à la profession d’astronome (University of Western Ontario).
« Cette décision a été la meilleure de ma carrière
», de dire Gilles Fontaine.
Le scientifique fait aussi preuve d’un dévouement notoire pour l’enseignement
auquel il se consacre depuis 1977 : « Ma plus grande satisfaction aura
été de contribuer à la formation d’étudiants et
de jeunes chercheurs. » Et ceux-ci le reconnaissent. Gilles Fontaine obtient,
au cours des années, trois prix en matière d’enseignement, dont
le Prix d’excellence en enseignement (1998-1999), catégorie « Professeurs
titulaires » de l’Université de Montréal, pour sa contribution
exemplaire.
Grâce à sa réputation, Gilles Fontaine met en place, dès
1981, une équipe de recherche qui, à son tour, attire d’excellents
candidats aux études supérieures, dont plusieurs recevront des
distinctions nationales pour la qualité de leurs travaux de doctorat.
Il se dit chanceux d’avoir pu compter sur les compétences inestimables
de son collaborateur principal, François Wesemael, et sur celles de ses
jeunes associés, Pierre Bergeron et Pierre Brassard. Fort de l’apport
de ces derniers, Gilles Fontaine est considéré comme l’un des
auteurs les plus prolifiques de sa discipline. Il compte plus de 200 articles
d’envergure à son actif, dont presque la moitié sont publiés
dans The Astrophysical Journal, la revue la plus réputée
dans le domaine de l’astrophysique. Excellent vulgarisateur, Gilles Fontaine
reçoit notamment le Prix de l’auteur 1990 de l’Association canadienne-française
pour l’avancement des sciences (ACFAS) pour un article paru dans Interface.
De brillantes découvertes
En 1982, Gilles Fontaine et ses collègues des universités du
Texas, de Rochester et du Colorado font état de la « prédiction
» théorique et de la découverte subséquente d’une
nouvelle catégorie d’étoiles pulsantes, les naines blanches du
type DB, une première dans le domaine de l’astrophysique, où la
découverte accidentelle précède presque toujours la théorie.
Ces réalisations attirent alors l’attention des médias les plus
importants d’Amérique du Nord.
En 1987, le groupe de collaborateurs fait à nouveau les manchettes en
proposant une nouvelle méthode pour déterminer l’âge de
l’Univers, basée sur la capacité à mesurer celui des naines
blanches les plus évoluées par des calculs de refroidissement.
Plus récemment, avec l’aide de ses associés, Gilles Fontaine prédit
une seconde fois, par le calcul, l’existence d’une autre catégorie d’étoiles
pulsantes : les sous-naines instables du type B. De plus, il vient tout juste
de révéler l’existence de deux nouvelles étoiles pulsantes
de ce type, confirmée lors d’un voyage à l’observatoire Mauna
Kea, à Hawaï.
Le réalisme des modélisations du groupe de Gilles Fontaine est
éprouvé. Sur la trentaine de familles d’étoiles variables
découvertes, toutes l’ont été accidentellement, sauf les
deux types d’étoiles « calculées » par ce dernier. Avec
ses collègues, il vient de choisir de se consacrer au calcul d’une nouvelle
génération de modèles évolutifs des naines blanches
dont les résultats seront cruciaux pour la cosmochronologie des galaxies
et pour l’interprétation des masses manquantes dans l’univers.
Plusieurs fois durant sa carrière, Gilles Fontaine voit la scène
nationale honorer la qualité exceptionnelle de ses travaux. En mai 2000,
il reçoit le prix Carlyle S. Beals de la Société canadienne
d’astronomie en reconnaissance de sa carrière de recherche innovatrice.
Et sa renommée s’étend aussi sur la scène internationale.
Dès 1979, le magazine américain Physics Today souligne
l’importance des travaux du jeune physicien sur l’équation d’état
de la matière dense utilisée dans la construction de modèles
numériques d’étoiles évoluées.
La polyvalence de Gilles Fontaine, qui observe et modélise tant l’intérieur
des étoiles que l’atmosphère qui les entoure, provoque l’admiration
chez ses nombreux collaborateurs à l’échelle mondiale. De l’avis
de tous, ses études ont un impact non seulement sur l’étude de
l’évolution stellaire et de la matière dense mais aussi sur l’astronomie
galactique, voire la cosmologie. Il n’est donc pas étonnant que Gilles
Fontaine soit devenu titulaire de la Chaire de recherche du Canada en astrophysique
stellaire en décembre 2000, ce qui lui permettra de poursuivre ses recherches
pendant encore de nombreuses années.