Guy Rouleau, lauréate

Neurologue

Naissance le 12 avril 1957 à Ottawa (Ontario), décès le à 

Entrevue

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Biographie

Guy Rouleau se décrit lui-même comme « un obsédé ». Mais rassurez-vous, c’est pour une bonne cause. « J’ai une véritable obsession pour les maladies neurologiques et psychiatriques, ce qui me pousse à essayer de les comprendre pour mieux les traiter », explique-t-il.

Ce combat contre les maladies du cerveau, le généticien, qualifié de « chercheur exceptionnel » par ses pairs, le mène avec courage et détermination depuis plus de vingt ans. Son arme de prédilection dans cette lutte à finir : les gènes.

En 1993, moins de quatre ans après avoir terminé son doctorat en génétique, il fait ses premières grandes découvertes. Cette année-là, il parvient à identifier le gène responsable de la neurofibromatose de type 2, une maladie qui frappe des jeunes dans la fleur de l’âge. « C’est une maladie horrible qui se déclare dans la vingtaine et durant laquelle les personnes atteintes développent de multiples tumeurs du cerveau. La mort survient très souvent dans la trentaine. »

Le gène, que le professeur titulaire au Département de médecine de l’Université de Montréal et son équipe ont isolé, est celui directement responsable du développement de tous les shwannomes, un groupe de tumeurs neuronales touchant en particulier les nerfs crâniens, spinaux et périphériques. « C’était vraiment une grande découverte à l’époque, car on venait d’isoler d’un coup le gène responsable de plus du tiers des tumeurs du cerveau », insiste le Dr Rouleau.

L’importance du diagnostic
En 1993, Guy Rouleau réussit un autre grand coup en identifiant l’un des gènes causant la sclérose latérale amyotrophique (SLA), une maladie dégénérative mieux connue sous le nom de « maladie de Lou Gehrig », et dont le diagnostic est des plus sombres. « Pour le moment, il n’existe qu’un médicament qui prolonge la vie des malades de quelques mois. »

Ces pronostics ne découragent pas l’éminent généticien, qui continue de travailler sans relâche afin de percer les mystères génétiques de la SLA dans l’espoir qu’un jour peut-être, on parvienne à la contrer. « Nous continuons d’avancer. À preuve, depuis 1993, nous avons trouvé trois autres gènes causant cette maladie. »

Les recherches de ce médecin de renommée internationale, dont la science s’appuie sur la génomique, la biologie cellulaire et la nano-imagerie, ne s’arrêtent pas là. En 1998, il découvre cette fois le gène responsable de la dystrophie musculaire oculopharyngée, une maladie rare qui touche une personne sur un million dans le monde, mais qui est particulièrement fréquente au Québec, où l’on dénombre un cas sur 1 000 habitants.

En 2002, celui qui dirige le Centre de recherche de l’Hôpital Sainte-Justine depuis 2006, fait de nouveau progresser la science. Cette fois, il parvient à isoler le gène responsable de la neuropathie sensitivo-motrice héréditaire avec agénésie du corps calleux. « Cette maladie entraîne chez les gens atteints une déficience intellectuelle, des problèmes psychiatriques et une grande difficulté à marcher. Le mal se déclare dans la petite enfance et les gens décèdent très souvent dans la trentaine. »

Avant la découverte de ce gène, des dizaines de nouveaux cas de cette maladie apparaissaient tous les ans au Québec. Aujourd’hui, elle est en voie de disparaître, explique le Dr Rouleau, car les couples qui sont à risque d’avoir un enfant malade à cause de leur hérédité peuvent avoir recours au conseil génétique et au diagnostic prénatal. « Cela nous permet de bien conseiller les gens. Il ne faut pas sous-estimer l’importance du diagnostic. »

Ce grand généticien a aussi identifié plusieurs gènes jouant un rôle dans le développement de l’autisme, en plus d’avoir insufflé de l’espoir à la lutte contre la schizophrénie en prouvant que le gène Shank3 était muté chez certains patients atteints de cette maladie.

Depuis le début de sa carrière, Guy Rouleau a découvert à lui seul une vingtaine de gènes responsables de maladies neurologiques et psychiatriques. Plusieurs étaient des maladies dites « orphelines », car délaissées par l’industrie de la recherche en raison du petit nombre de gens atteints.

Celui qui a été fait officier de l’Ordre national du Québec en 2007 est reconnu comme l’un des premiers chercheurs à avoir implanté les méthodes de génétique modernes à l’étude et à la caractérisation des maladies neurologiques.

Œuvrer au Québec
Originaire de Vanier, dans la région d’Ottawa, ce franco-ontarien a pris conscience très jeune des souffrances causées par la maladie. « Mon père était omnipraticien et j’ai rapidement développé un intérêt pour la biologie et le domaine biomédical. »

Après avoir obtenu son diplôme en médecine à l’Université d’Ottawa, Guy Rouleau débarque à Montréal au début des années 1980. À l’Université McGill, son chemin croise celui du neurologue Dr Albert J. Aguayo. Cette rencontre est déterminante. « C’est à ce moment que j’ai choisi la neurologie. »

De 1982 à 1985, il effectue une spécialisation dans cette discipline à l’Université McGill avant de s’exiler aux États-Unis pour faire des études doctorales en génétique à la prestigieuse Université Harvard.

En 1989, son doctorat en poche, il tourne le dos à une carrière au pays de l’Oncle Sam pour revenir à Montréal. Pour ce francophone, il était hors de question d’exercer la médecine à l’extérieur du Québec. « Je voulais que mes enfants soient francophones. J’aurais pu faire une belle carrière aux États-Unis, mais on m’a donné ici toutes les occasions de progresser. »

Un survol du curriculum vitæ de cette sommité mondiale en génétique suffit à nous en convaincre. En une vingtaine d’années, ce titulaire de la Chaire de recherche du Canada en génétique du système nerveux a obtenu plus de 50 millions de dollars en subventions de recherche.

Guy Rouleau a rédigé une quarantaine de chapitres de livres et publié plus de 500 articles scientifiques dans les meilleures revues, comme The Lancet, New England Journal of Medicine, Science, Cell, Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS) et Nature. Il a aussi donné plus de 120 conférences dans de nombreux pays, notamment aux États-Unis, en France, au Japon, en Arabie saoudite, en Inde, au Mexique et en Angleterre.

Jamais à court d’initiatives, Guy Rouleau a aussi fondé le Centre d’excellence en neurosciences de l’Université de Montréal (CENUM) en 2007.

En deux décennies, celui que l’on qualifie de « pédagogue naturel » a supervisé les travaux de plus de 40 étudiants au doctorat et de 38 chercheurs postdoctoraux. En incluant les étudiants à la maîtrise, ce sont plus de 100 jeunes scientifiques qui ont jusqu’à maintenant bénéficié de son esprit d’initiative et de son expertise.

La maladie comme un casse-tête
Au fil des ans, le médecin généticien à la tête du Réseau de médecine génétique appliquée a récolté plusieurs honneurs, dont le prix Léo-Pariseau (Acfas 1999), le Prix de la recherche en santé Michael-Smith (IRSC 2000), le prix Henry‑Friesen, remis par le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada (2007), le prix Genesis – Biotechnologie de demain (2011) et le Prix de carrière de la Fondation des étoiles (2010).

Pour Guy Rouleau, la génétique est une grande source d’espoir afin de réduire la souffrance causée par les maladies neurologiques et psychiatriques. Mais cela demande de la patience et beaucoup de persévérance. « Il faut voir la maladie comme un casse-tête dont chaque gène que l’on parvient à isoler est une pièce. Bien sûr, on n’a pas un portrait global avec un seul gène, mais notre vue d’ensemble devient plus claire chaque fois que l’on découvre un nouveau gène. Je fais un travail difficile, qui comporte de gros défis, mais en bout de ligne, c’est très gratifiant », conclut-il.

Information complémentaire

Date de remise du prix :
13 novembre 2012

Membres du jury :
Lucie Jeannotte, présidente
Muriel Herrington
Nabil Seidah
Hélène Ezer
Michel Charbonneau

Crédit photo :
  • Rémy Boily
Crédit vidéo :
Production : Sylvain Caron Productions Inc.
Réalisation : Sylvain Caron
Coordinatrice de production : Lynda Malo
Caméra et direction photo : Mathieu Harrisson
Caméra : Hugo Ferland-Dionne
Maquillage : Hélène-Manon Poudrette, Sylvie Charland
Montage : Sylvain Caron
Infographie et montage : Mathieu Harrisson
Mixage sonore : Studio Song
Musique originale : Christine Boillat
Musiciens : André Bilodeau, Christine Boillat, David Champoux et Daniel Marcoux
Entrevues : Christian St-Pierre
Texte :
  • MDEIE