Professeure émérite du Département des littératures de langue française de l’Université de Montréal, essayiste, critique littéraire, nouvelliste et plus encore, Lise Gauvin, après avoir obtenu un doctorat en littérature de la Sorbonne, a mené une brillante carrière dans l’enseignement. Or, il faut surtout retenir l’esprit dans lequel elle poursuit son cheminement : une curiosité insatiable à l’égard de la langue française et de la situation de l’écrivain francophone.
« J’aime apprendre et j’ai une curiosité naturelle pour une foule de sujets. J’ai encore beaucoup de projets en chantier. Je viens de déposer un manuscrit sur le roman francophone. Je termine aussi un baccalauréat en musique à l’Université de Montréal. J’en suis assez fière. »
Tout au long de sa carrière, Lise Gauvin a cherché à comprendre l’évolution parallèle de la langue française et de la littérature en plaçant côte à côte les auteurs de différents espaces francophones. L’interrelation de la langue et de l’écriture, elle l’a examinée dans tous ses rhizomes. Ainsi, elle a fait œuvre de pionnière en proposant un portrait d’ensemble de la situation de l’écrivain de langue française et en s’intéressant à la portée de l’acte d’écrire dans différents contextes.
À en juger par leur nombre impressionnant, les réalisations de Lise Gauvin semblent relever de l’exploit. Son œuvre se démarque tant par son étendue que par son unicité. En effet, tout en maintenant son point de vue comparatiste, elle est parvenue, en les scrutant avec constance et acuité, à jeter un éclairage nouveau sur les rapports de la langue française avec la littérature et la société québécoise.
Son propos emprunte plusieurs formes – essais, nouvelles, critiques, anthologie, etc. – et trouve un écho favorable dans la francophonie. Ses publications lui valent les éloges de la critique et une large diffusion internationale. Pour leur pertinence et le caractère inédit de leurs lignes de force, ses travaux et ses concepts – dont celui de « surconscience linguistique » – font autorité.
« Je suis heureuse que mes concepts aient pu être utiles et utilisés dans toutes les littératures francophones. Cela signifie qu’ils correspondent à des réalités très diverses, mais liées par des dénominateurs communs. »
L’écrivain francophone à la croisée des langues (1997 et 2006), Langagement : l’écrivain et la langue au Québec (2000), La fabrique de la langue : de François Rabelais à Réjean Ducharme (2004 et 2010), Écrire, pour qui? : l’écrivain francophone et ses publics (2007) et D’un monde l’autre : tracées des littératures francophones (2013); voilà quelques-uns des ouvrages majeurs qui jalonnent son parcours. De toutes ses publications, l’écrivaine dit cependant avoir un faible pour ses nouvelles, ses fictions et ses récits plus personnels. « J’aime bien théoriser sur la langue, mais j’aime aussi la manier de façon plus libre. Mon travail d’écrivaine, j’y tiens. »
Une autre valeur attribuée à ses activités réside dans l’accompagnement de ses étudiants. D’ailleurs, la qualité de son enseignement se traduit par la direction d’une quarantaine de mémoires et de thèses. Car Lise Gauvin demeure attachée à la formation d’une relève compétente et active. « Je trouve stimulant de travailler avec de plus jeunes passionnés. »
Chemin faisant, la renommée de Lise Gauvin s’est étendue par ses invitations comme conférencière dans de nombreux pays, sa participation à des jurys prestigieux, ses collaborations avec les médias, entre autres la direction de la revue Études françaises, de 1994 à 2000, et sa chronique « Lettres francophones » au journal Le Devoir. À cela s’ajoutent ses ouvrages traduits et de multiples distinctions.
Bref, partout, on sollicite sa parole et son érudition. Lise Gauvin se voit ainsi reconnue par plusieurs organismes : membre de la Société royale du Canada et de l’Académie des lettres du Québec, officière de l’Ordre du Québec, membre de l’Ordre des francophones d’Amérique et chevalière de l’Ordre des Palmes académiques (France).
En septembre 2018, Lise Gauvin participe à la formation du Parlement des écrivaines francophones avec des auteures des cinq continents. « Je souhaite que ce parlement rende plus visible le point de vue des femmes sur l’éducation et la société. J’espère aussi que cette dynamique renforcera le rayonnement des œuvres de femmes qui sont trop souvent reléguées au second plan. Un regroupement de femmes de tous horizons peut aussi favoriser l’égalité et donner davantage de poids au moment d’intervenir. »
Ainsi, par cette nouvelle avenue, Lise Gauvin poursuit sa formidable incursion dans la langue française pour nourrir une curiosité intellectuelle qui jamais ne fléchit.