Forte et singulière, intense et habitée de personnages qui portent
en eux leur poids de vie, l’œuvre de Monique Bosco fait entendre une voix
unique et essentielle venue enrichir les lettres québécoises d’une
authentique quête de la parole à travers une vision universelle
de la condition humaine. Elle exprime la difficulté de vivre en mettant
en scène des personnages dont le destin, si ancré soit-il dans
la réalité québécoise, nous ramène aux grandes
tragédies grecques qu’elle transpose dans des situations contemporaines
(New Medea, 1974 ; Portrait de Zeus peint par Minerve, 1982),
aux origines juives de l’auteure et aux figures de la Bible (La Femme de
Loth, 1970) « où, dit l’auteure, je puise mes histoires pour
m’éviter de raconter les miennes ».
Dans ce Québec dont elle a fait à 21 ans son pays d’adoption
et d’écriture, Monique Bosco dit avoir trouvé une grande ouverture
d’esprit et des structures beaucoup moins contraignantes qu’en France. «
Quoi qu’on dise sur l’enfermement du Québec des années cinquante,
j’y ai trouvé, moi, des gens curieux, avides de s’ouvrir au monde »,
souligne l’écrivaine. Devenue professeure titulaire à l’Université
de Montréal, elle prend la succession du père Ernest Gagnon, fondateur
du cours de création littéraire.
Pour certains, l’institution doit à cette femme généreuse
et profondément engagée l’essentiel de ce qui s’est réalisé
dans ce domaine par la suite. Comme pionnière de la modernité
dans la littérature québécoise, Monique Bosco a non seulement
soutenu et encouragé les espoirs créateurs de ceux et celles qui
se sont imposés comme des figures dominantes, mais elle a aussi contribué
à l’émergence de la parole des femmes, tant par la trame de son
œuvre que par son enseignement qui porte, entre autres sujets, sur la création
au féminin. « Ici comme ailleurs, constate-t-elle, l’écriture
des femmes n’est pas assujettie aux canons littéraires. Elles osent aller
dans tous les sens, mélanger la fiction et le drame, imposer leur propre
façon de dire et de faire. C’est ce qui constitue leur force mais qui,
en même temps, rend ardue leur reconnaissance littéraire. »
Consciente que les œuvres qui comptent à ses yeux ne sont pas préfabriquées
mais émergent du plus profond de l’inconscient, Monique Bosco s’insurge
contre l’entêtement de certains critiques à parler des romans de
femmes comme autant d’autobiographies, alors qu’il s’agit plutôt, selon
elle, d’autoportraits romancés.