Professeure agrégée au Département de génie chimique de l’Université McGill et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les matériaux d’origine biologique, Noémie-Manuelle Dorval Courchesne est une figure de la relève scientifique. Native de l’Outaouais, elle a fait ses études en Ontario et au Massachusetts avant de s’installer à Montréal pour établir sa carrière indépendante en 2017. Lors de son parcours universitaire, elle s’est consacrée à la fusion du génie et de la biologie synthétique, visant à développer des matériaux fonctionnels d’origine biologique pour des applications plus écologiques. Sa motivation principale est le développement durable avec la conviction que les matériaux inspirés de la nature peuvent mener à des technologies propres et intégrées de manière harmonieuse à l’environnement.
« Recevoir le prix Hubert-Reeves représente une reconnaissance fantastique de mes travaux et de mes efforts pour bâtir un groupe de recherche créatif, multidisciplinaire et inclusif. C’est un honneur d’être reconnue par un prix qui porte le nom d’un scientifique passionné par la recherche, la protection de l’environnement et la vulgarisation scientifique. Ces thèmes me tiennent à cœur, et ce prix solidifie ma volonté de m’impliquer dans toutes ces facettes du milieu de la recherche. »
Noémie-Manuelle Dorval Courchesne consacre sa carrière à l’intersection du génie chimique et de la biologie synthétique, une combinaison qui lui permet de repousser les frontières de l’innovation dans les matériaux d’origine biologique. Dès le début de ses études universitaires, elle a plongé dans la recherche, travaillant dans des laboratoires de chimie et de génie biochimique et électrochimique. Cette expérience variée a été la base de ses travaux actuels, qui se concentrent sur trois principaux domaines : la bioélectronique, les bioplastiques et les tissus « intelligents » biodérivés.
Ses recherches sur les protéines qui s’autoassemblent ont contribué à la modification de fibres amyloïdes, dont la résistance mécanique est exceptionnelle, pour leur donner de nouvelles propriétés. Ces protéines sont extrêmement prometteuses pour la fabrication de matériaux avancés en raison de leur capacité à résister à divers environnements tout en étant génétiquement modifiables pour offrir de nouvelles fonctionnalités.
On note également, parmi ses réalisations marquantes, le développement de bioprocédés simples, rapides et peu coûteux pour créer des fibres protéiques. Ces fibres, produites par des bactéries inoffensives, peuvent être utilisées comme biopolymères pour fabriquer des pellicules biologiques, offrant une solution de rechange aux plastiques traditionnels. Ce procédé breveté a comblé un fossé entre la production de protéines en solution et leur utilisation pratique à grande échelle.
« Je suis particulièrement fière d’avoir contribué à la progression des matériaux fonctionnels faits à base de protéines. Les protéines sont traditionnellement employées dans des dispositifs microscopiques; mon équipe et moi avons comblé un fossé permettant la fabrication de matériaux solides ou semi-solides facilement manipulables à une échelle macroscopique. Ces matériaux protéiques pourraient servir [de solutions de rechange] à certains plastiques. »
En matière de bioélectronique, Noémie-Manuelle a lancé un projet d’évolution dirigée de fibres protéiques pour les rendre conductrices d’électricité, en s’inspirant de phénomènes naturels. Ce projet ambitieux implique la collaboration de biochimistes et de physiciennes et physiciens pour produire et isoler des protéines mutantes à haut débit, avec l’espoir de révolutionner le domaine de la bioélectronique.
Son engagement dans la recherche est également soutenu par une solide base de financement, comprenant une subvention de 1,8 M$ du Fonds des leaders John-R. Evans pour l’acquisition d’instruments spécialisés. Ces instruments facilitent la caractérisation avancée des matériaux biologiques, dont peut profiter la communauté scientifique de McGill et de Montréal.
Au-delà de ses contributions scientifiques, cette chercheuse de la relève est une fervente défenseuse de l’équité et de la diversité en génie. Elle sert de modèle pour les jeunes filles intéressées par les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques, et travaille à intégrer des groupes sous-représentés dans ces disciplines. Son implication se traduit également par son rôle de défenseuse de l’égalité, par des participations à des formations et à des conférences pour promouvoir des perspectives pour les femmes en génie.
Et quant à l’avenir, elle souligne : « […] en recherche, il est toujours possible d’aller plus loin. De nouvelles questions surgissent constamment, et de nouveaux objectifs se créent. Dans mon laboratoire, nous avons développé plusieurs procédés innovants, mais il reste encore de nombreux domaines d’application à explorer et de nombreuses façons d’améliorer ces matériaux pour les rendre encore plus performants ou plus écologiques. »