Pour les Québécois, le nom de Raymond Lévesque évoque
d’abord et avant tout une chanson inoubliable : Quand les hommes vivront
d’amour. Composée en 1956, devenue un succès en France par
les voix d’Eddie Constantine et de Cora Vaucaire, remise en vogue en 1974 après
que Félix Leclerc, Robert Charlebois et Gilles Vigneault l’eurent chantée
en chœur lors de la Superfrancofête, à Québec, elle
n’a cessé d’être reprise par de nouveaux interprètes et
fait partie des chansons immortelles du monde francophone.
Après avoir écrit « une centaine de chansons dans le style
de Charles Trenet », Raymond Lévesque commence à trouver
son propre style : une poésie du peuple, chargée tour à
tour de mélancolie, de colère et d’humour. En 1946, Fernand Robidoux,
chanteur de charme à la mode, remarque ses compositions, les intègre
à son tour de chant et l’encourage à être son propre interprète.
Initié ainsi aux arts d’interprétation, Raymond Lévesque
déborde bientôt de la chanson et fait en 1949 ses débuts
comme acteur à la radio, puis en 1952 à la télévision
de Radio-Canada. Il participe à la création de Zone de
Marcel Dubé, une des pièces les plus importantes du répertoire
québécois, qui lui vaut un prix d’interprétation.
En 1954, le chanteur-acteur traverse l’Atlantique et s’installe à Paris
pour cinq ans. Il est de toutes les boîtes à chansons aux côtés
de Jacques Brel, Guy Béart, Barbara, Jean Ferrat, Pierre Perret, etc.
À son retour au Québec, Lévesque fonde avec Clémence
Desrochers, Jean-Pierre Ferland, Claude Léveillée et Hervé
Brousseau, la boîte à chansons Les Bozos, un modèle pour
les nombreuses autres boîtes du genre qui voient le jour un peu partout
au Québec. À la même époque, il écrit un autre
de ses grands succès, Bozo les culottes, connu d’abord par la
voix de Pauline Julien.
Toujours marquée par une conscience sociale, son écriture prend
alors un tournant plus politique et plus engagé dans ses monologues.
« Il n’y a pas vraiment de fiction dans mon œuvre, explique-t-il,
à l’exception d’une petite part dans certains récits. Ma préoccupation
reste toujours la même : dénoncer les fausses valeurs, l’injustice,
le mensonge, la guerre, etc. ».
Devenu une des figures marquantes de la chanson francophone, Raymond Lévesque
trace tout de même un bilan modeste d’une carrière qu’il dit avoir
vécue au jour le jour.