Yves De Koninck, lauréate

Naissance le à South-Bend, Indiana (États-Unis), décès le à 

Yves De Koninck, prix Wilder-Penfield 2022

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Biographie

« Le cerveau, c’est un million de milliards de connexions. Il y a plus de chemins possibles dans votre cerveau que d’atomes dans l’univers », déclare d’emblée le neurobiologiste spécialiste de la douleur chronique. L’ampleur de la tâche en effraierait plus d’un, mais Yves De Koninck s’attaque à l’étude de cet organe complexe sans hésiter.

Ses travaux ont mis en évidence le mécanisme responsable des signaux erronés de douleur, soit une circulation anormale des ions chlorure, lesquels freinent habituellement l’action du neurone de relais. Le problème survient quand une protéine agissant comme une pompe est défaillante. Le flux des ions chlorure s’inverse et leur quantité augmente dans les cellules, ce qui cause un déséquilibre chimique. Les neurones de relais sont alors excités, plutôt qu’inhibés, et la douleur s’installe.

Cette découverte constitue un changement de paradigme. Exit le syndrome psychosomatique : la douleur chronique est bel et bien une maladie. En établissant la cascade cellulaire et moléculaire qui l’engendre, le chercheur a ouvert la porte au développement de médicaments pour mieux la contrôler, en plus d’aider à déstigmatiser cette condition. Par l’entremise du Réseau québécois de recherche sur la douleur, qu’il a fondé en 2002, les travaux du neurobiologiste ont aussi contribué à déployer un continuum de services au Québec et à bonifier la formation du corps médical.

Après un baccalauréat en biologie à l’Université Laval et un doctorat en physiologie à l’Université McGill, deux postdoctorats mènent Yves De Koninck à l’Université Stanford, en Californie, et au Southwestern Medical Center de l’Université du Texas. Mais c’est au Québec qu’il choisit de bâtir sa carrière et d’élever sa famille. Professeur à l’Université McGill à partir de 1995, puis à l’Université Laval cinq ans plus tard, il contribue à y instaurer le programme de formation en recherche neurophysique, à l’interface de la physique et des neurosciences. En 2003, il fonde également le Centre de neurophotonique, qui mènera à la création du programme d’études supérieures en biophotonique.

À l’image des neurones qui génèrent 10 000 connexions chacun, le scientifique multiplie les collaborations. Avec ses collègues, il explore aussi les domaines des nanotechnologies et de l’intelligence artificielle. Cet adepte de transdisciplinarité et lauréat du prestigieux prix Brockhouse du Canada en est convaincu : une aventure conjointe s’impose. Il encourage la mise en commun du savoir des sciences physiques et chimiques, de l’ingénierie et des mathématiques. Son objectif : « Créer des technologies non invasives et miniatures, qui permettent de mesurer les choses les plus complexes. On doit développer les technologies de demain pour percer les mystères du cerveau. »

Atout considérable pour promouvoir la collaboration, le professeur cumule les rôles. En plus d’occuper la Chaire de recherche du Canada sur la douleur chronique et les troubles cérébraux associés, il est directeur de recherche au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Capitale-Nationale. Inépuisable homme-orchestre, il assume aussi la fonction de directeur scientifique du Centre de recherche CERVO ainsi que de l’imposante initiative Sentinelle Nord. Visant à améliorer notre compréhension de l’environnement nordique et de son influence sur l’être humain et sa santé, ce projet permet à l’équipe de concevoir des outils d’optique photonique. Ces instruments ultraperformants exploitent les propriétés de la lumière pour explorer autant le cerveau que les organismes qui se cachent sous la calotte glaciaire.

« Il faut encourager la collaboration entre les gens qui développent les technologies et les gens qui les utilisent. Il faut créer des occasions de tester toutes ces technologies pour accélérer leur conception et les rendre pertinentes le plus vite possible. » Fort de ses 10 brevets et déclarations d’invention, le neurobiologiste est catégorique : l’innovation est indissociable de la recherche.

Le cerveau humain représente la plus grande ressource de notre planète, à son avis. Il rêve que la population québécoise s’enorgueillisse davantage des talents scientifiques à l’œuvre ici et que la société investisse dans ce patrimoine fantastique. « Le Québec est l’une des puissances mondiales dans le domaine des neurosciences. Je pense que nous sommes capables de tout, mais nous devons croire en nous-même. »

Pour Yves De Koninck, le succès de la recherche dépend de la relève. Les prochaines grandes découvertes se cachent peut-être dans l’esprit de spécialistes qui ont l’audace d’acquérir une double formation. La clé se trouve dans la plasticité des jeunes cerveaux, qui leur confère une remarquable capacité d’adaptation, et donc d’apprentissage.

Ainsi, l’universitaire ne ménage aucun effort pour favoriser le partage de connaissances et le développement des compétences. Deux organisations ont d’ailleurs célébré sa contribution à la formation des nouvelles générations de scientifiques, avec le prix Emily Gray de la Biophysical Society et le prix pour l’éducation de la Society for Neuroscience.

Après trois décennies, Yves De Koninck retire toujours autant de satisfaction à apprendre aux côtés de ses cohortes étudiantes. Pourquoi bouder son plaisir? Après tout, son sujet de prédilection ne risque pas de se tarir! « Les possibilités émergent au fur et à mesure que l’information se complexifie. Les mystères du cerveau et de la pensée sont infinis. »

Résumé de la carrière de Yves De Koninck

Yves De Koninck a mis en évidence un mécanisme responsable de la douleur chronique, ouvrant la porte au développement de médicaments pour mieux la gérer. Ce neurobiologiste adepte de transdisciplinarité cumule les mandats de direction, notamment au CIUSSS de la Capitale‑Nationale et au Centre de recherche CERVO. Titulaire d’une chaire de recherche du Canada, le prolifique professeur de l’Université Laval a contribué à fonder le programme de formation en recherche neurophysique, le Centre de neurophotonique et l’initiative Sentinelle Nord. De quoi titiller les neurones!

Information complémentaire

Membres du jury :

  • François-Thomas Michaud (président)
  • Alain Lamarre
  • Benoit Chabot
  • Sumitra Rajagopalan